Le Sénat a déjà commencé à détricoter la loi sur les négociations commerciales. Un travail de la commission des affaires économiques, le 8 février, a été mené en préalable aux discussions de la chambre haute en séance plénière prévues le 15 février. Sous réserve de surprises lors des débats, il donne à voir la ligne que pourraient suivre les sénateurs au sujet de ce projet de loi, avant un retour à l’Assemblée nationale.
La commission des affaires économiques, donc, a adopté plusieurs amendements qui modifient en profondeur le texte voté par les députés.
Le premier changement concerne la disparition des préavis de rupture, une décision surprise sortie des rangs de l’Assemblée nationale. Aujourd’hui, les contrats prévoient qu’en cas de désaccord, les anciens tarifs continuent de s’appliquer durant un délai souvent très long (plus d’un an).
En période d’inflation, les distributeurs y voient une aubaine pour ne pas répercuter les hausses. Les grands industriels, de leur côté, réclamaient de pouvoir appliquer automatiquement les nouveaux tarifs le temps du préavis (l’aubaine aurait alors changé de camp). Afin que personne n’abuse du système, les députés ont préféré faire disparaître les préavis, quitte à fragiliser les petites entreprises dans la négociation.
La commission des affaires économiques du Sénat privilégie une autre mesure intermédiaire. Elle propose de maintenir les préavis, en appliquant au tarif un indicateur objectif qui tiendrait compte de "la situation économique du marché" ou, a minima, de "l’évolution du prix des matières premières agricoles".
600 millions d’euros prélevés dans la poche du consommateur
Autre changement : le relèvement de 10% du seuil de revente à perte serait suspendu jusqu’au 1er janvier 2025. "Ce mécanisme représente chaque année environ 600 millions d’euros prélevés dans la poche du consommateur sans qu’ils n’aient "ruisselé" sur les agriculteurs", observe la commission. Cette marge obligatoire imposée aux enseignes, de fait, n’a jamais été clairement redistribuée.
Le plafonnement des promotions (34% de remise maximum, sur 25% des volumes de vente) serait lui étendu à l’ensemble des PGC. Il ne concerne pour l’heure que l’alimentaire, et il a eu pour effet de déplacer la guerre des prix sur les produits de droguerie-parfumerie-hygiène. Les sénateurs se proposent donc d’y mettre fin.
"Il appartient au législateur de corriger le tir lorsqu’une mesure adoptée a des effets de bord : c’est ce que nous faisons en encadrant les promotions sur les produits non alimentaires, explique Sophie Primas, la présidente de la commission des affaires économiques du Sénat. Sans cela, et compte tenu du nombre de ces produits fabriqués en France, nous courrions un risque important en matière d’emploi, d’investissement et d’innovation dans ces secteurs."