L’Ania ne veut plus "s’étriller" avec la grande distribution
Après une année 2016 qui a mis les marges sous pression, les industriels alimentaires condamnent des négociations "encore plus dures" pour 2017, entachées d’abus.
"Il faut que la grande distribution collabore davantage avec nous, lance Jean-Philippe Girard, président de l’association nationale des industries alimentaires (Ania). Cela ne sert à rien de s’étriller année après année. La guerre des prix ne relance plus la consommation : si on continue de détruire un milliard d’euros de valeur par an, on va où ?"
Alors que les cours des matières premières repartaient à la hausse en 2016 (+14%, selon l’Ania), les prix à la consommation des produits alimentaires ont continué de baisser (-1%, selon Iri).
Les baisses de prix par rayon en 2016
Source : Iri via Ania
|
Alors que les cours des matières premières alimentaires ont globalement explosé au cours des années 2000 (ils ont quasiment été multipliés par six), la tendance est repartie à la baisse, dans des proportions moindres, entre 2011 et 2015. Les chutes de cours enregistrées en 2015, en particulier, n’avaient pas joué en faveur des industriels durant les négociations pour 2016.
"Les fortes hausses de cours observées en 2016 vont se reproduire en 2017, prévoit Jean-Philippe Girard. Mais les distributeurs, dans les box, ont une nouvelle fois demandé des baisses de prix."
Affolés par l’augmentation des cours du porc, en particulier, les industriels de la charcuterie réclament même officiellement, via leur fédération (la Fict), une réouverture des négociations annuelles avec les enseignes, jugées pour l’heure "révoltantes".
Clauses abusives
Selon nos informations, des industriels de différents secteurs ont signalé à l’Ania plusieurs comportements condamnables des distributeurs à l’occasion des négos 2017 : signatures hors délai, clauses abusives.
L’an dernier, des remontées similaires avaient conduit à une perquisition des locaux de Carrefour par l’administration, entraînant par la suite l’assignation en justice du distributeur.
Des propositions pour la présidentielle
L’industrie alimentaire, en France, représente davantage d’emplois directs que le commerce et la restauration réunis : 427.000 salariés pour la première, 337.000 pour les seconds.
En 2016, le secteur a créé (en solde net) plus de 4.000 nouveaux emplois.
Si l’on y ajoute sa contribution positive à la balance commerciale du pays (plus de 7 milliards d’euros d’excédent l’an dernier, essentiellement grâce aux vins et spiritueux) et son rôle de premier débouché de l’agriculture française, le secteur s’estime doté d’assez d’arguments pour peser sur les programmes des candidats à l’élection présidentielle.
L’Ania en appelle ainsi à la création d’un ministère de l’Alimentation, chargé notamment de promouvoir "une vision plus positive de l’alimentation". De façon plus pragmatique, l’association réclame aussi la suppression "des taxes inutiles" et un moratoire sur "la fiscalité comportementale inefficace". Ainsi qu’une remise à plat du cadre des négociations commerciales et une simplification des réglementations, qu’elles soient sanitaires ou environnementales.