L'Autorité de la concurrence devrait très vite hériter du dossier sur le rapprochement entre Auchan et Système U. L'instance vient tout juste, pourtant, de pointer du doigt l'alliance des deux distributeurs, regrettant des risques accrus d'échanges d'informations sensibles.

Dans son édition du 15 mai, Le Figaro annonce que les instances européennes, les premières à étudier le projet de rapprochement entre Auchan et Système U, auraient décidé de transmettre directement le dossier à l'Autorité française de la concurrence.

Cette information n'est pas une surprise, mais ce n'est pas pour autant une bonne nouvelle. Le mois dernier, l'Autorité a déjà rendu un avis, à la demande du ministre de l’Économie et de la commission des affaires économiques du Sénat, sur les différentes alliances nouées à l'achat entre enseignes.

Il ne s'agissait pas (encore) d'une enquête pouvant donner lieu à des sanctions ou injonctions, mais d'un simple avis de principe, documenté toutefois à partir d'entretiens menés avec les industriels au sortir des négociations annuelles de 2015.

Une défiance claire envers les alliances

Dans cet avis, donc, les sages de la rue de l’Échelle ont exprimé une défiance claire envers ces alliances. Notamment parce qu'elles permettent aux enseignes d'accentuer la pression sur leurs fournisseurs, sans contrepartie évidente.

"Une majorité des industriels, rapportait l'Autorité, indiquent avoir été confrontés à des demandes de déflation sensibles du prix triple net, lesquelles n'ont été accompagnées d'aucune proposition de contrepartie additionnelle de la part des distributeurs."

Dans sa publication, l'Autorité de la concurrence s'attardait explicitement sur l'alliance entre Système U et Auchan. Estimant que des "risques significatifs d'échanges d'informations sensibles" entre les deux partenaires étaient "accrus du fait de l'absence de garantie structurelle et des difficultés liées à la distinction des négociations du triple net et des contreparties".

L'article du Figaro, en rappelant les grandes lignes du projet de rapprochement que préparent Auchan et U, bien au-delà des seuls achats avec les grandes marques, a suscité l'émoi de nombreux médias grand public.

Les deux distributeurs ont d'ailleurs réagi en publiant un communiqué de presse commun, le jour même, pour préciser qu'aucune nouvelle étape n'avait été franchie depuis leur dernière annonce officielle sur le sujet en début d'année.

Pas même un retour des autorités européennes, à ce stade, sur un prochain transfert du dossier à Paris.

Pas de "bascule systématique" d'enseignes

Les deux distributeurs ont confirmé qu'ils souhaitaient créer "une entité de coordination de leurs actions communes".

Le périmètre des achats négociés ensemble, aujourd'hui centré sur les grandes marques, ne serait élargi qu'aux achats indirects mais continuera d'exclure les petites entreprises et les produits bruts agricoles.

Auchan et Système U ont aussi rappelé, sur la question des changements d'enseignes, que tout était loin d'être figé dans le marbre et qu'il ne fallait pas "imaginer des bascules systématiques".

Les Simply Market prendront bien le panonceau Super U, mais pas tout à fait comme des "franchisés". Le parc de supermarchés restera bien sûr intégré et propriété d'Auchan, avec à ce titre "une participation aux instances de décision de Système U".

L'avenir des Hyper U, en revanche, est passé sous silence parce qu'il dépendra d'abord de la décision des associés propriétaires des magasins. Certains voudront choisir le concept Auchan, d'autres rester U. Il est très peu probable que l'enseigne Hyper U continuera d'être exploitée (les hypers qui le souhaitent devenant alors des Super U).

S'agissant de la proximité, à ce stade, chaque distributeur a prévu de continuer à développer son propre concept : A2pas chez Auchan, U Express chez Système U.