Étiquetage nutritionnel : un test bien décevant en magasin

17 octobre 2016 - B. Merlaud

Étiquetage nutritionnel : un test bien décevant en magasin

Linéaires a visité deux magasins participant à l'expérimentation du ministère de la Santé sur l'étiquetage nutritionnel. Les résultats sont décevants : un produit sur deux, dans les rayons retenus pour l'étude, n'affiche aucun pictogramme. Avec de fortes disparités, en outre, d'un supermarché à l'autre. Bref, les conclusions à tirer d'une telle expérience ne seront guère éclairantes…

La loi santé de janvier 2016 prévoit d'instaurer un système d'étiquetage nutritionnel graphique sur les emballages des produits alimentaires pour améliorer l'information du consommateur.

Cet étiquetage ne sera pas obligatoire (il reposera sur le volontariat), mais le ministère de la Santé a entrepris de tester en magasin quatre systèmes différents afin de choisir celui qu'il recommandera.

Ce test (qui va tout de même coûter la bagatelle de 2,2 millions d'euros !) est réalisé dans 60 supermarchés intégrés, Carrefour Market, Casino et Simply Market, de fin septembre à début décembre. 10 points de vente par système testé, auxquels s'ajoute un échantillon témoin de 20 sites non étiquetés.

29 industriels ont donné leur accord

Les hypermarchés ont d'emblée été exclus de l'étude à cause du trop grand nombre d'articles à sticker avec l'un ou l'autre des pictogrammes testés. De même, de six rayons au départ, l'expérimentation a finalement été restreinte à trois familles de produits : pains, brioches et viennoiseries préemballés (épicerie), pizzas, tartes et plats cuisinés (traiteur frais), plats cuisinés en conserve.

Une équipe de 70 "chargés d'étiquetage" a pour mission d'apposer, en magasin, les stickers figurant les pictogrammes nutritionnels sur les marques des 29 industriels ayant donné leur accord, ainsi que sur les MDD des enseignes participantes.

Au démarrage de l'opération, les responsables du test reconnaissaient déjà que les échantillons stickés ne représenteraient finalement pas l'ensemble de l'offre des rayons étudiés : 86% des pains et viennoiseries, 76% des plats et pizzas traiteur, 63% des plats en conserve.

Mais, promettaient-ils aussitôt, ces taux théoriques d'articles stickés seraient supérieurs en magasin.

Las. Dans les points de vente visités par Linéaires, un supermarché Simply Market et un Carrefour Market dans les Yvelines, c'est tout le contraire.

Taux de produits stickés

Objectif théoriqueSimply MarketCarrefour Market
Pains et viennoiseries86 %33 %71 %
Plats et pizzas traiteur76 %21 %71 %
Plats cuisinés épicerie63 %25 %46 %

Source : Linéaires. 2 points de vente visités dans les Yvelines le 14 octobre 2016.

Le jour de notre relevé, chez Simply Market, les… trois quarts des produits ciblés n'étaient porteurs d'aucun pictogramme ! Chez Carrefour Market, on arrive à 63% d'articles étiquetés : encore insuffisant pour correspondre au niveau théorique prévu par l'étude.

Difficile, dans ces conditions, de mesurer comment des pictogrammes peuvent modifier les arbitrages des clients au sein d'une famille de produits. Impossible même de comparer l'impact sur une référence isolée, si elle est étiquetée chez l'un mais pas chez l'autre.

C'est dommage. Les résultats de ce test comparatif promettaient en effet d'être intéressants.

Les notations synthétiques gagnent en lisibilité ce qu'elles perdent en nuance

L'expérience met en compétition deux types d'étiquetage. Deux systèmes sont dits "analytiques" : ce sont les plus complets (ils notent séparément les aliments sur les graisses, le sel, les calories, etc.), mais sont aussi les moins faciles à lire rapidement devant un rayon.

Les deux autres systèmes de notation sont eux "synthétiques". L'analyse nutritionnelle d'un produit ne donne lieu qu'à une seule note, assortie d'un code couleur incitatif ou dissuasif. Le pictogramme gagne en lisibilité ce qu'il perd en nuance.

L'un des deux modèles synthétiques, qui se traduit par une note de A à E (poussé par le professeur Hercberg), est vivement combattu par les industriels. L'Ania y voit une stigmatisation simpliste et inutilement culpabilisante.

L'association nationale des industries alimentaires lui préfère l'autre système synthétique, qui traduit les notes en recommandations sur la fréquence de consommation, ou l'un des deux modèles analytiques (celui, là encore, qui s'abstient de faire figurer des feux rouges sur les notes).

L'un des enjeux du test était ainsi de mesurer le degré de compréhension, par le consommateur, des pictogrammes analytiques par rapport aux notes synthétiques. Au vu de la qualité de mise en œuvre en magasin, il est fort probable que les conclusions qui seront tirées de cette expérimentation ne parviennent jamais à réconcilier les différents camps.

Les quatre systèmes d'étiquetage nutritionnel en compétition

Nutri-Score

Un code de A à E souligné par cinq couleurs, allant du vert au rouge. Les aliments sont notés en fonction des teneurs en nutriments majeurs.

Nutri-Score

Sens

La notation initiée par Carrefour, depuis reprise et modifiée par la FCD. Le système, à quatre couleurs, prône des fréquences de consommation variables en fonction de la teneur en nutriments majeurs.

Sens

Nutri-Repère

Une version améliorée des repères nutritionnels journaliers. Pour les apports nutritionnels de référence, le système indique la contribution d'une portion aux apports quotidiens recommandés.

Nutri-Repère

Traffic Lights

Largement répandus au Royaume-Uni depuis plusieurs années, ces feux rouges nutritionnels (trois couleurs) reposent eux aussi sur la contribution d'une portion aux apports quotidiens recommandés.

Traffic Lights

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