Crise des éleveurs : le ping pong entre enseignes et industriels peut démarrer !
De nouveau pris pour cibles par les éleveurs, les distributeurs multiplient les engagements et les actes de transparence. Ils pointent du doigt les industriels, restés silencieux.
Dotés de leur propre outil industriel, Intermarché et Leclerc se sont déjà engagés à surpayer le porc français sur le marché au cadran de Plérin, afin de faire remonter les cours.
Depuis ces annonces, formulées il y a deux semaines, les cours ont effectivement commencé à remonter. Mais ils sont repartis à la baisse depuis quelques jours.
"Le prix allemand devient très attractif"
L'explication, selon Le Télégramme : la chute des cours en Allemagne, attirant d'autant plus les industriels que les prix remontent en France.
"Leclerc et Intermarché ont respecté leurs annonces, rapporte au Télégramme Daniel Picard, le président du Marché du porc breton. La Cooperl de Lamballe les a suivis. En revanche, d'autres opérateurs ne jouent pas le jeu. Le prix allemand devient très attractif pour nos salaisonniers qui ont repris leurs achats en masse en Allemagne ou en Espagne. Ils n'ont que faire des difficultés de la filière porcine."
Dans une belle unanimité, les distributeurs condamnent cette attitude des industriels. Les communiqués de presse fleurissent pour regretter le silence des abattoirs et des transformateurs. Michel-Edouard Leclerc, sur son blog, reproduit même les cotations du 18 juin dernier à Plérin, détaillant les prix consentis par différents acheteurs.
Carrefour rappelle qu'il "ne peut pas agir directement sur les cours, n'ayant pas d'activité intégrée d'abattage et de découpe".
Lidl, qui s'engage à surpayer la viande bovine (mais pas porcine), dénonce "une situation complètement inattendue car les industriels de la viande n'ont toujours pas fait d'offre tarifaire en ce sens".
"Notre souci est que pour effectuer les revalorisations, nous devons passer par l'intermédiaire des industriels, car nous ne proposons à Lidl que de la viande pré-conditionnée, a déclaré à l'AFP Michel Biero, gérant des achats chez Lidl France. Nous n'avons pas d'abattoir ni de lien direct avec les éleveurs."
Système U, dont les associés installés dans l'Ouest ont peu apprécié d'être pris pour cible par les éleveurs, rappelle lui aussi qu'il "n'est pas opérateur direct au cadran de Plérin". Il s'en remet à ses fournisseurs, Cooperl pour la viande fraîche de porc et Brocéliande pour les produits transformés à la marque U, avec qui il a déjà négocié des prix d'achat sur la base d'un cours du porc plus rémunérateur pour les éleveurs.
La coopérative dit aussi accepter une sur-cotation de la viande bovine et élargit le débat au secteur laitier (qui commence à rejoindre les éleveurs porcins et bovins dans les actions coup de poing).
Dans son communiqué de presse, Système U pointe en effet explicitement "les fournisseurs de produits laitiers à marques nationales". Pour conclure ses négos, le distributeur a pris comme base un prix payé aux éleveurs à 34 centimes le litre.
Or, à ce jour, "le litre de lait est acheté à la production 30 centimes", observe Système U, s'interrogeant "sur ce différentiel qui devrait revenir aux producteurs".
Pendant ce temps, les promos continuent...
Alors qu'Intermarché respecte ses engagements de surpayer le porc sur le marché au cadran, l'enseigne lance ce 23 juin une promotion spectaculaire sur le porc frais.
Dans plusieurs magasins de l'Ouest, les côtes de porc français, vendues dans des caissettes de 1 ou 2 kg, s'affichent à 2,65 euros le kilo (contre 7,50 euros en fond de rayon !).
A titre de comparaison, la semaine dernière, le prix des côtes de porc conditionnées par 5 à 10 en hypers et supers était en moyenne de 5,40 euros le kilo, selon les relevés du RNM (le réseau des nouvelles des marchés du ministère de l'Agriculture).
Pour mémoire, depuis le 12 juin dernier, un arrêté interdit sur la viande de porc, en dehors des mois de janvier et septembre, les rabais supérieurs "à la moitié du prix moyen pratiqué hors promotion pour des produits similaires au cours du mois précédant l'opération".