Bercy se penche sur des négos 2017 sous tension
Le gouvernement dresse un premier bilan d'étape des négociations commerciales pour 2017. Selon les industriels, les échanges sont déjà entachés d'irrégularités et de pratiques abusives.
À Bercy, les ministres Michel Sapin (Économie), Stéphane Le Foll (Agriculture, Agroalimentaire) et Christophe Sirugue (Industrie) ont réuni ce 20 décembre distributeurs, industriels et agriculteurs dans le cadre d'un "comité de suivi des relations commerciales".
"À cette occasion, les ministres ont exprimé leur vigilance sur les négociations qui viennent de démarrer", appuie-t-on à Bercy. L'impact, en particulier, des concentrations et alliances à l'achat, côté distribution, est surveillé de près.
Michel Sapin et Christophe Sirugue ont demandé aux services de la répression des fraudes "une poursuite déterminée des contrôles", en ciblant les centrales d'achat.
Il faut dire que l'association nationale des industriels alimentaires (Ania) s'est présentée à cette réunion avec une liste de griefs précis. Elle recense déjà plusieurs pratiques jugées abusives, signalées chacune par plusieurs fournisseurs.
"Atterrissages des accords 2016"
"Lors des négociations commerciales, les acheteurs ne nous parlent plus des produits, des attentes des consommateurs ou même de nos tarifs, se désole Jean-Philippe Girard, le président de l'Ania. La négociation, ou ce qui en reste, démarre sur les prix trois fois nets de l’année précédente pour demander de nouvelles baisses. C'est dangereux et inacceptable."
Avant même d'entamer les négociations pour 2017, des industriels se voient réclamer, selon l'association, des "atterrissages des accords 2016". Autrement dit des rallonges sur les budgets négociés l'an passé.
À la guerre des prix entre enseignes s'est désormais ajoutée une guerre des promos : les budgets consacrés aux nouveaux instruments promotionnels (NIP) s'en trouvent alourdis et sont imposés "sans négociation possible".
Autre sujet de grief : des menaces d'arrêts de commandes, de déréférencements ou de retrait pur et simple des produits des rayons, à effet immédiat.
L'association dénonce également une "pression financière sans précédent" sur les conditions de livraisons réclamées par les distributeurs : "les pénalités logistiques deviennent une véritable manne financière pour les centrales d’achat", qui multiplient "les nouvelles exigences".
Dans le même temps, les distributeurs s'accorderaient au contraire "des reports de paiements toujours plus importants" en fin d'année.
Perquisitions
En janvier 2016, l'Ania avait déjà signalé des pratiques abusives constatées en négos. Elle ciblait notamment Carrefour pour l'exigence d'une "remise complémentaire de distribution", au nom de la logistique servant la proximité, dont l'acceptation par les fournisseurs devait être un préalable à toute négociation.
Une dénonciation qui avait été suivie en février par une perquisition de la DGCCRF dans les locaux de Carrefour, puis par une assignation en justice, opportunément lancée par le gouvernement en novembre, au démarrage des nouvelles négociations annuelles. À cette occasion, Bercy prévenait que des assignations supplémentaires, concernant d'autres enseignes, étaient envisagées.