Encore une alliance : Carrefour se rabiboche avec Cora
Carrefour et Cora annoncent à leur tour un accord de coopération à l'achat. Provera, la centrale de Cora et des Supermarchés Match, adhère à la centrale d'achat de Carrefour France à compter du 1er janvier 2015.
Cet accord sera donc effectif pour les négociations annuelles 2015, pourtant déjà entamées. En alimentaire, une centaine de grands industriels sont concernés, pour des marques nationales et internationales.
En non alimentaire, une quarantaine de fournisseurs, essentiellement du bazar, sont également dans la boucle.
Le partenariat exclut "les marques de distributeur, les produits élaborés par les PME et les produits frais issus des filières agricoles", précisent les deux distributeurs dans un communiqué commun.
Cette adhésion "de long terme" ne s'assortit d'aucun lien capitalistique entre les deux groupes, chacun conservant son indépendance, ses prix et sa politique promotionnelle.
Tarifs et contreparties
Selon les précisions recueillies par Linéaires, la centrale d'achat de Carrefour France négociera donc pour Provera, auprès des industriels, les tarifs et les contreparties, les mises en avant, les places en rayon, les taux de détention en magasins, etc.
Avec ce rapprochement, Cora renonce à une partie de l'indépendance qui cimente la culture maison du groupe. Mais le distributeur ne pouvait guère se permettre de rester à l'écart des manœuvres de ces derniers mois, à l'issue desquelles quatre mastodontes de taille à peu près équivalente dominaient le paysage commercial : Carrefour, Leclerc, Intermarché-Casino, Auchan-Système U.
Pour Carrefour, l'intérêt à court terme d'une telle opération est moins palpable. Certes, sa centrale va pouvoir se renforcer de quelques volumes supplémentaires. Certes, le distributeur se prémunit du risque de voir Provera aller consolider une alliance adverse. Mais, sauf à considérer que l'adhésion à la centrale de Carrefour se monnaye rubis sur l'ongle (ce qui ne semble pas avéré au vu de nos informations), le premier distributeur français fait surtout un joli cadeau à un concurrent mis en difficulté par son isolement.
Évidemment, cette main tendue est tout sauf désintéressée.
Un ancien "partenaire"
Carrefour trouve en effet le moyen, aujourd'hui, de renouer avec un ancien "partenaire". A ses débuts, entre 1969 et 1974, la société fondée par Philippe Bouriez était franchisée Carrefour, avant de lancer par la suite l'enseigne Cora.
En 1996, Carrefour avait même racheté à la hussarde 41% du capital de Cora auprès d'un frère et d'une sœur de Philippe Bouriez, et à son insu. Mais ces parts n'ont jamais rien rapporté à Carrefour, et certainement pas la perspective de monter un jour davantage au capital de Cora. D'où leur revente, en 2001, à Deutsche Bank, avec alors une option d'achat pour Casino.
Jean-Charles Naouri n'a lui non plus rien obtenu de ces parts, hormis une fâcherie et finalement leur revente, à un très bon prix, à la société Cora elle-même en 2006.
Aujourd'hui, Philippe Bouriez n'est plus là. Son héritage est vivace chez Cora, à commencer par cette farouche culture de l'indépendance qui l'animait. Mais si un jour la famille Bouriez revoit ses positions, Carrefour sera désormais le mieux placé pour en profiter.