Centrales d’achat : le jeu des alliances en pleine ébullition
Les assauts répétés des autorités françaises fragilisent les centrales d’achat européennes. Agecore est en train d’exploser et perd Intermarché, qui recherche de nouveaux partenaires. Les scénarios envisagés échauffent les esprits.
Agecore n’aura pas résisté longtemps. La centrale d’achat européenne avait directement été mise en cause par le gouvernement français, en février 2021, dans le cadre d’un dossier visant Intermarché. Un mois plus tard, on apprend que les deux membres les plus lourds de la centrale, les Mousquetaires et Edeka, ont décidé de quitter Agecore.
Depuis 2018, plusieurs enquêtes des autorités françaises ciblent directement les pratiques des centrales internationales, contestant leur légitimité en même temps que leurs méthodes parfois musclées.
Agecore et Eurelec dans le viseur de la France
Intermarché est ainsi accusé d’avoir imposé à des fournisseurs de payer un écot à Agecore simplement pour préserver leur volant d’affaires avec l’enseigne en France. Les prestations facturées par la structure basée en Suisse, elles, se révélant sans contrepartie économique réelle.
Eurelec, la centrale associant Leclerc et l’allemand Rewe, est également dans le viseur des autorités françaises. Leclerc se voit reprocher de contourner la réglementation hexagonale en délocalisant une partie des négociations avec les industriels. En 2020, le distributeur a écopé d’une amende pour avoir dépassé la date butoir du 1er mars, une échéance légale qui ne s’applique qu’en France.
L’enjeu est énorme. Les distributeurs s’abritent derrière la législation européenne, censée prévaloir sur les dispositions nationales, pour négocier librement. Si la France échoue à défendre ses prérogatives, tout l’encadrement des négos se retrouvera menacé.
Intermarché logiquement courtisé
Mis en difficulté par son assignation en justice, Intermarché se prépare évidemment à rebondir. Le distributeur va-t-il recréer avec Edeka une structure mieux armée pour résister aux assauts législatifs de la France ? Va-t-il chercher au contraire à nouer une autre alliance ?
Sur le marché hexagonal, Intermarché s’est retrouvé esseulé en 2018 quand il s’est séparé de Casino, parti convoler avec Auchan. Exception faite du ralliement de Francap, le groupement d’indépendants s’est depuis débrouillé seul pour négocier avec ses fournisseurs nationaux. Mais sa croissance exceptionnelle depuis deux ans en fait aujourd’hui un partenaire de choix, logiquement courtisé.
Interrogations sur Casino et Auchan
Selon Les Échos, le scénario d’un nouveau rapprochement avec Casino fait partie des hypothèses mises sur la table. Avec Intermarché qui piloterait les achats alimentaires et Casino les négos non alimentaires.
Par ricochet, cette perspective vient fragiliser Horizon, la centrale qui associe aujourd’hui Auchan, Casino et Metro. Il est en effet peu probable qu’Auchan, en grande difficulté commerciale dans l’Hexagone, puisse se permettre de négocier seul avec ses fournisseurs nationaux. Il chercherait alors lui aussi à nouer un nouveau partenariat.
Bref, on l’aura compris, le mercato des alliances, en France comme en Europe, bat son plein.