La FNIL met en garde sur la hausse du prix du lait
La FNIL (fédération nationale des industries laitières) et l'ATLA (association de la transformation laitière française) ont pris la parole au lendemain de la crise et de l'accord, finalement conclu à 290 € les 1000 l, qui a focalisé l'attention sur le géant Lactalis.
Selon Eurostat, au premier semestre 2016, la France rémunérait en moyenne ses éleveurs 304 € la tonne contre 270 € en Allemagne et même 255 € en Pologne.
Olivier Picot, président de la fédération, se refuse à commenter spécifiquement l'accord trouvé entre le Mayennais et les producteurs... mais trouve le moment assez opportun pour alerter sur un isolement économique croissant de l'Hexagone à l'échelle mondiale, potentiellement fatal pour la filière.
Et ce sont les groupes généralistes, type Lactalis ou Sodiaal, qui en souffriraient le plus : " Les prix en France décrochent dangereusement du marché, européen en particulier, ce qui nous rend extrêmement inquiets. Cette perte de compétitivité se traduit inéluctablement par un renforcement de la concurrence. "
Quant à savoir comment cette hausse payée aux éleveurs se répercutera sur les prix de vente, Olivier Picot botte en touche : " On verra plus tard ! "
Retraite dangereuse
Cet isolement s'avère dangereux pour plusieurs raisons selon les industriels et les transformateurs. Avant tout, 44 % de la production laitière française est exportée, soit 11 milliards de litres de lait sous toutes ses formes.
Si les prix montent en France jusqu'à pointer durablement au plus haut niveau Européen, la concurrence aura beau jeu d'aller chercher des parts de marché. C'est d'autant plus regrettable, selon la fédération, que nous avons une maîtrise de la production et de la conduite d'élevage qui est reconnue partout dans le monde : " L'agroalimentaire français à l'étranger concerne presque exclusivement le vin et le fromage. La filière laitière, extrêmement performante, peut se permettre un peu d'ambition ! Se déployer à l'échelle mondiale est dans l'intérêt des industriels et des producteurs ", pointe Olivier Picot.
Notre économie est fondée sur la compétitivité, pas sur l'emploi local. On ne peut pas nous le reprocher à nous. |
Nous sommes capables de créer de la valeur en France, à l'exemple des spécialités AOP et du bio. Mais les volumes ne sont pas encore suffisants : 2,5 % des volumes pour le lait bio et 10 % pour les AOP. Le protectionnisme représenterait une autre issue, comme au Canada, pays qui a fermé ses frontières laitières. Mais comment faire l'impasse sur les 11 milliards de litres exportés ?!
" Notre dispositif ouvert est sans doute peu adapté à une certaine vision collective de la filière idéale. Un système capillaire et des emplois en régions font sens, certes . Mais nos gouvernements successifs ont bâti précisément l'inverse. Notre économie est fondée sur la compétitivité, pas sur l'emploi local. Ce sont les règles du jeu qu'on nous a données. On ne peut pas nous le reprocher à nous ! "
La solution : réguler
La FNIL n'élude pas les difficultés du milieu agricole. La fédération en appelle à un dispositif d'aide efficace pour les éleveurs en grande précarité. Justement ceux dont la filière aura besoin à l'avenir : les jeunes exploitants qui ont investi et élaboré des business plans sur les prix du lait au plus haut.
Mais là encore, la performance prime selon l'organisation, qui rappelle que sur 500 000 exploitations existantes avant quotas, il en subsiste 60 000 aujourd'hui pour une production nationale supérieure. " Il faut se résigner. La vraie porte de sortie reste la compétitivité dans un monde ouvert ", lance Olivier Picot.
La solution serait alors de réguler. La FNIL plaide pour une telle démarche, non pas à l'échelle de l'Hexagone, mais au moins à celle européenne, qui permettrait d'appliquer les mêmes règles pour tous les acteurs du secteur laitier. Quid du plan d'aide de l'UE et du gouvernement pour inciter à la baisse de la production ?
" Conditionner les aides à une réduction de volume part d'un bon sentiment. Néanmoins, expliquer à un Irlandais, qui produit du lait dans des conditions extrêmement performantes, qu'il doit faire marche arrière est une gageure ! On a besoin de dispositifs beaucoup plus régulateurs que celui-là. "