Thierry Cotillard, Intermarché : "J'attends des candidats à la présidentielle une évolution de la LME"

21 novembre 2016 - Propos recueillis par B. Merlaud

Thierry Cotillard, Intermarché : J'attends des candidats à la présidentielle une évolution de la LME

Intermarché participait pour la première fois au salon du Made in France, à Paris, du 18 au 20 novembre. Une présence logique pour les Mousquetaires, qui avaient à cœur de faire valoir les 60 unités de production de leur parc industriel en France, ainsi que les 11.000 emplois qui y sont liés.

Thierry Cotillard, président d'ITM Alimentaire International, a à cette occasion accordé un entretien à Linéaires. Le patron d'Intermarché et de Netto appelle de ses vœux un nouveau cadre pour les négociations commerciales, un traitement législatif différencié des PME ainsi qu'une meilleure défense, en Europe, de l'industrie et de l'agriculture françaises.

Votre outil industriel, votre stratégie de producteur-commerçant vous distinguent de la concurrence. Mais pensez-vous pour autant faire mieux que les autres en matière de made in France ?

En moyenne, 76% des produits vendus en grande distribution sont made in France. Chez nous, c'est 83%. Donc oui, nous faisons mieux que la concurrence.

Allez-vous encore développer ce parc industriel, investir dans de nouvelles productions ?

Nous allons surtout renforcer nos pôles d'excellence. Sur des filières pour lesquelles nous sommes convaincus qu'il faut sécuriser les approvisionnements, maîtriser les prix et les cahiers des charges. À savoir la mer, la viande ou encore la boulangerie-pâtisserie. Nous allons par exemple inaugurer prochainement trois bateaux, dans un nouveau schéma à 50/50 avec des artisans pêcheurs. C'est cette stratégie qui nous permet de passer en magasin des volumes incroyables de coquille Saint-Jacques ou de rôti de bœuf à des prix très attractifs. Des opérations commerciales hyper puissantes, que les clients adorent.

Pousserez-vous un jour plus loin cette logique d'intégration des filières, avec un investissement dans l'agriculture ?

Nous développons des partenariats avec les agriculteurs, nous signons des contrats pour sécuriser leurs débouchés, mais non, nous n'allons pas acheter des fermes. La terre, c'est encore un autre métier.

Il s'est murmuré l'an dernier que la reprise de l'abattoir de Gad vous avait été fortement suggérée par le gouvernement, qui en contrepartie se serait montré plus clément dans une affaire d'assignation en justice sur des négociations commerciales. De nouvelles assignations sont en préparation cette année. Votre investissement dans l'industrie française représente-t-il de ce point de vue un atout dans vos relations avec l’État ?

Non, ces sujets ne sont pas liés. Notre outil industriel n'est pas un élément de négociation avec les pouvoirs publics. Le reste n'est que rumeurs.

Le made in France est un thème évidemment couru par tous les hommes politiques. Qu'attendez-vous des candidats à l'élection présidentielle sur le sujet, et sur celui des relations commerciales en général ?

J'ai un double message à leur faire passer. D'abord, j'attends de leur part des engagements concernant la compétitivité de l'industrie et du monde agricole français, face à nos partenaires européens. Qu'ils s'emparent des questions du dumping social et du moratoire sur les normes.

Ensuite, nous sommes en droit d'attendre leurs réflexions sur la LME (loi de modernisation de l'économie, NDLR). Afin de trouver un juste milieu entre le service rendu au consommateur, son pouvoir d'achat, et les effets collatéraux sur les filières de production.

Entre la loi Galland et la LME, nous avons connu des schémas transitoires, comme celui de la loi Dutreil, qui pourraient inspirer aujourd'hui, au moins pour les filières agricoles, de nouveaux ajustements.

Êtes-vous également partisan d'un traitement différencié, par le législateur, des PME et des grands groupes dans les relations commerciales ?

Oui. Il est clair que nous sommes beaucoup plus exigeants avec les grands groupes, à la rentabilité confortable. J'ai plus d'empathie pour ceux qui, comme nous, sont des patrons de PME.

Comment abordez-vous les négociations commerciales pour 2017 ? Seront-elles encore plus tendues que les précédentes ?

Nous abordons les négos déterminés, mais avec sérénité. Nos perspectives de croissance à trois ans feront la différence. Les industriels, avant tout, recherchent les centrales qui vendent, celles qui vont prendre des marchés et leur assurer des volumes supplémentaires.

Sur quoi fondez-vous une telle assurance quant à votre croissance à venir ?

Sur de multiples facteurs. Nous allons pousser plus loin l'expression des politiques commerciales de nos différentes vocations (Contact, Super, Hyper, etc.). Notre statut de Producteur Commerçant est aussi un facteur d'attachement à la marque. Le poids du digital, chez nous, est également un facteur de croissance. Nous allons lancer mi-décembre une marketplace non alimentaire, intermarche-shopping.fr. Et l'applicatif terrain, enfin, est un autre levier de croissance pour nous. Nous mettons en place un schéma important de décentralisation, avec des projets coconstruits par les régions et Tréville.

Cette décentralisation, c'est un mouvement de balancier qui vient "compenser" le grand travail, ces dernières années, de revue des assortiments mené par le siège ?

Maintenant que le tronc commun est clair (on a rentré 5000 références supplémentaires), on passe en phase deux. On fait du chirurgical, on laisse les régions s'approprier le sujet. On ne bloque pas les référencements, on construit ensemble.

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