Rappels de produits : vers de nouveaux codes-barres ?
Un rapport remis au gouvernement sur les rappels de produits préconise de changer les codes-barres sur les emballages pour y intégrer une traçabilité par lot. Les distributeurs sont aussi invités à revoir leurs procédures, à davantage former leur personnel et à mieux alerter les consommateurs.
Le fiasco des laits infantiles Lactalis, en début d'année 2018, avait mis à jour de graves insuffisances dans les procédures de rappel. Les dirigeants des enseignes étaient tombés de leur chaise en découvrant que leurs équipes avaient parfois continué (longtemps) à vendre les produits incriminés, voire qu'elles les remettaient en rayon quand un client les ramenait à son magasin. Le tout dans un contexte de grande confusion, avec des informations fractionnées délivrées par l'industriel.
Des pharmacies, des hôpitaux et des crèches avaient aussi été mis en cause pour ne pas avoir appliqué correctement les rappels.
Le 16 janvier dernier, le ministre de l'Économie a missionné le Conseil national de la consommation afin d'élaborer de nouvelles recommandations sur un sujet devenu sensible. Ses conclusions ont été présentées ce 17 juillet au gouvernement par les deux rapporteurs du dossier, Jean-Yves Mano (président de l'association Consommation, logement et cadre de vie) et Emilie Tafournel (directrice qualité de la Fédération du commerce et de la distribution).
Les numéros de lot ajoutés aux codes-barres
La première préconisation, la plus efficace mais aussi la plus compliquée à mettre en œuvre, consiste à adopter un nouveau système d'identification sur les emballages.
Les codes-barres actuels (avec 13 chiffres) ne contiennent pas d'information sur les numéros de lot, ceux-là mêmes qui permettent d'isoler les produits à retirer des rayons. D'où l'idée d'ajouter des chiffres supplémentaires ou d'apposer des codes 2D sur les packs, plus riches en données.
Techniquement, une telle solution apporte tous les renseignements facilitant le retrait et le blocage ciblé des articles en caisse. Dans le secteur du médicament, les codes 2D vont même permettre à partir de 2019 une traçabilité non pas au lot mais à la boîte.
Les auteurs du rapport, toutefois, ont conscience de la lourdeur qu'implique un tel changement et des années qui seront nécessaires à son entrée en application s'il est acté.
Ne pas exiger le ticket de caisse
En attendant, d'autres pistes de progrès sont aussi présentées, plus classiques.
Concernant la grande distribution, le Conseil national de la consommation appelle de ses vœux la définition de procédures plus complètes et plus rigoureuses : désignation et formation du personnel d'astreinte, instructions simples et standardisées remises aux magasins, circuits de communication redondants afin de pallier la défaillance éventuelle d'un canal, anticipation de scénarios du "pire cas".
L'information du consommateur devra également être plus visible et plus lisible. Sans termes techniques minimisant l'importance du rappel (parler de "risque pour la santé" plutôt que de "défaut de qualité"), sans exigences compliquant le retour (autoriser le remboursement sans ticket de caisse, par exemple). Les affiches de rappel seront installées à plusieurs endroits en magasins (pas seulement dans un cahier à l'accueil), jusque sur les pistes de retrait des drives, voire dans les colis livrés à domicile.
Et lorsqu'un article est ramené à l'accueil par un client (ce qui arrive fréquemment pour des échanges), la consultation des rappels en cours devra être obligatoire avant toute remise en rayon. Une évidence, mais qui a visiblement besoin d'être reprise partout, noir sur blanc.
Un site administratif unique
Le rapport préconise aussi (et le gouvernement s'y est déjà engagé) la création d'un site administratif unique, sur internet, regroupant à l'attention des professionnels et du grand public l'ensemble des rappels en cours.
Le Conseil national de la consommation plaide au passage pour la définition d'un troisième niveau d'alerte (après le "retrait simple" et le "retrait avec rappel"), réservé aux cas les plus graves. Ce niveau pourrait justifier des mesures exceptionnelles comme le blocage massif de références en caisse (en provenance d'un site industriel ou d'un bassin de production), l'utilisation de données nominatives de paiement récupérées auprès du secteur bancaire, la diffusion de messages d'alerte dans les médias, etc.
Le gouvernement a déjà commencé, enfin, à plancher sur de nouvelles sanctions plus dissuasives et plus facilement applicables aux opérateurs défaillants.
Le texte présenté, à ce stade, n'a qu'une valeur de recommandation. Au-delà des quelques engagements déjà annoncés par les pouvoirs publics, les pistes proposées sont loin d'avoir valeur de loi. Pour l'instant.