Les distributeurs ont fait baisser les prix en négos
Les industriels alimentaires s'étranglent des baisses de prix qu'ils ont dû consentir aux enseignes à l'issue des négociations commerciales. Ils dénoncent, derrière les discours, une prise en compte finalement très partielle des détresses agricoles.
Conformément à la loi, les négos sur les marques nationales devaient être bouclées le 29 février. Jean-Philippe Girard, le président de l'association des industries agroalimentaires, évoque aujourd'hui des "promesses non tenues" et un "climat d'extrême tension".
"La réalité des coûts des fournisseurs est niée et l’approvisionnement français n'est pas du tout considéré par la grande distribution dans ses relations avec les entreprises agroalimentaires", regrette le porte-parole des industriels, qui avait déjà signalé à Reuters des demandes de baisses de 3 à 6%.
La Feef, qui représente les PME, se dit elle aussi déçue des négociations commerciales 2016, malgré les accords passés en amont avec les distributeurs et les promesses de traitement différencié.
"Les dirigeants des enseignes et des centrales d’achat nous soutiennent mais dans les box, les négociations restent guidées par la guerre des prix, déplore Dominique Amirault, le président de la Feef. Les demandes de dégradations sont généralisées, quelle que soit l’évolution du cours des matières premières."
Position ambivalente
La fédération nationale des industries laitières pointe elle aussi la position ambivalente des distributeurs. "Ils se targuent d'avoir maintenu les prix sur le lait de consommation à marques nationales" mais de tels engagements, calcule la Fnil, ne concernent en réalité que 2,9% de la production laitière française.
Dans le même temps, les acheteurs de la grande distribution ont selon la fédération "exigé et obtenu" des baisses de prix sur les autres produits laitiers, fromages, beurre et ultra-frais.
"Dans un yaourt, le prix du lait c’est 18%, a répondu sur France Info Jacques Creyssel, le président de la fédération du commerce et de la distribution. A côté, il y a un pot en plastique, dont le prix dépend du cours du pétrole. C’est normal qu’il y ait des discussions sur les autres produits qui rentrent dans la composition de ce que vous mangez tous les jours."
Les MDD, qui pèsent pour 21% de la production laitière et dont les négociations ne sont pas soumises au même calendrier que les marques nationales, feraient également l'objet, selon la Fnil, de demandes de "baisses de prix importantes".
Dans ces conditions (et en tenant compte de la baisse des cours du lait en poudre ainsi que du beurre industriel), laisser croire que le prix payé aux éleveurs laitiers va se stabiliser en 2016 relève de la "tromperie caractérisée", prévient la fédération.
Jacques Creyssel, toujours sur France Info, a refusé de chiffrer toute évolution des prix obtenus en négos, faute de "synthèse globale". "On n’a pas aujourd’hui l’ensemble des éléments, a-t-il botté en touche. Le ministre nous avait demandé des engagements précis sur le lait. Sur ce sujet là nous avons regardé ce qu’il en est, pour le reste nous aurons des bilans d’ici une quinzaine de jours."