Le duo Auchan-Rocca veut bousculer la distribution corse
Un petit événement à l’échelle nationale, mais une vraie révolution à l’échelle locale. Tous les Corses attendaient ce 8 novembre l’ouverture du nouveau centre commercial Atrium dans la proche périphérie d’Ajaccio. Il faut dire que le dispositif commercial concocté par Patrick Rocca a de quoi susciter le respect : 55 000 m² de retail park, 54 cellules de galerie (avec des enseignes comme Séphora ou H&M, inédites sur l’île), un hyper Auchan de 6 440 m² également exploité par Patrick Rocca. Le tout a mobilisé un investissement majuscule de 120 M€ !
Sans compter les 900 logements voisins dont le groupe Rocca est lui-même promoteur également, avec un « billet » de 100 M€ additionnels pour ce seul volet. Rocca va également financer des infrastructures collectives (crèche, école, centre de fitness, salles de sport, patinoire, pôle de restauration) qui contribueront à faire d’Atrium une zone de vie à part entière, au-delà du commerce.
Si le projet XL du groupe Rocca a connu les affres des recours, tout est allé très vite une fois les travaux débutés. Les premiers coups de pioche du nouveau complexe ont été donnés en octobre 2016 seulement ! L’enjeu de cette course de vitesse était double : ouvrir avant les fêtes 2017 et prendre un temps d’avance sur François Padrona, l’adhérent Leclerc local, dont le nouvel hyper de 9 000 m², planté à 200 m de là seulement, est prévu pour mars. Était prévu pour mars devrait-on dire, car la cour administrative d’appel de Marseille a retoqué le projet début novembre pour des questions d’accès au site. François Padrona devra désormais se pourvoir en cassation devant le Conseil d’État.
« Vendre des petits pois »
Après le transport, la gestion des déchets et l’immobilier, Patrick Rocca s’essaie donc au commerce. Et ne fait pas les choses à moitié comme à son habitude. Il avait déjà repris en franchise il y a deux ans le Décathlon ouvert sur le futur site d’Atrium en 2011, que l’enseigne peinait à exploiter en propre.
Reste que « vendre des petits pois » comme le dit Patrick Rocca est un métier à part entière. La société Primo, qu’il détient directement ou indirectement à 90 %, va donc exploiter ce premier Auchan corse. Les équipes du groupe nordiste ont sérieusement épaulé celles de Rocca pour les aider à concevoir leur hyper. Lequel est fidèle aux derniers canons de l’enseigne, adoptant notamment le nouveau design inauguré à Auchan Noyon (60) à la rentrée. La vocation du site est clairement alimentaire, avec un non-al concentré sur la maison, l’équipement et la culture.
L’absence de compétence alimentaire de Rocca et d’historique de l’enseigne sur l’île a constitué une double contrainte s’agissant de la constitution des équipes. A fortiori sur les métiers de bouche, on s’en doute, pour lesquels le franchisé a dû débaucher à la concurrence ou séduire des artisans indépendants. Les salariés (220 au global, tous en CDI et à temps complet) ont été formés par Auchan sur le Continent, passant de 3 semaines à 2 mois selon les postes dans les hypers du groupe.
La direction de l’hyper a, elle, été confiée à une ex-Auchan, Marie-France Dewitte, qui était déjà installée en Corse.
Les ambitions de Rocca et de son associé minoritaire, Dominique Demedardi, s’agissant de leur hyper restent raisonnables. Le point mort a été calculé à 42 M€, pour un prévisionnel à 45 M€ en année 1. Raisonnable, donc, car les magasins dépassant les 10 K€ / m² sont légion sur l’île où la densité d’équipement commercial restait faible (au moins jusqu’à aujourd’hui) et les prix mécaniquement plus élevés que sur le Continent.