La hausse du SRP va générer 1% d'inflation mécanique

6 février 2018 - B. Merlaud, avec E. Ronsin

Un niveau record de hausse des prix en 2017

La hausse du SRP va générer 1% d'inflation mécanique

Linéaires a fait ses calculs. L'augmentation du seuil de revente à perte souhaitée par le gouvernement devrait représenter 1% de dépenses supplémentaires pour les ménages, à achats constants. C'est beaucoup, mais trois fois moins que ce qu'annonce UFC-Que Choisir.

La hausse du SRP doit limiter la guerre des prix en "forçant" les enseignes à prendre 10% de marge minimum sur les prix d'achat, pour couvrir leurs coûts de distribution. Mais peu de produits, en réalité, sont aujourd'hui vendus avec moins de 10% de marge.

Sur la base du compte d'exploitation type d'un hypermarché moyen, que Linéaires s'est procuré, 12% de l'assortiment épicerie en fond de rayon est ainsi commercialisé avec une marge allant de 0% à 9,9%. Ces références, forcément emblématiques, assurent à elles seules 21% du chiffre d'affaires. Si elles passent toutes, du jour au lendemain, à 10% de marge, les dépenses des ménages (à achats constants) augmenteront de 1%.

Le même calcul, sur les liquides, aboutit à 2% de hausse. Le résultat est à l'inverse plus faible sur le frais LS, où moins de produits sont vendus à la planche, et quasi nul sur le frais trad.

Baisses de tarifs

Au final, selon nos estimations, l'impact mécanique du nouveau SRP sera de +1% environ sur les dépenses alimentaires. Mais une part des achats des ménages, on le sait, va se détourner des marques ainsi inflationnistes au profit des MDD (ce qui, pour les marges des enseignes, sera au passage encore plus profitable).

Afin que les hausses soient moins brutales, il y aussi fort à parier que les industriels vont consentir quelques baisses de tarifs sur les blockbusters les plus bataillés, compensées par des augmentations diluées sur le reste de leur gamme.

L'étude d'impact des députés

Une étude d'impact réalisée par l'Assemblée nationale arrive à une conclusion similaire (0,7% d'inflation), quoique par un chemin plus étonnant.

La commission qui a travaillé sur les effets du nouveau SRP ne s'est intéressée qu'aux promotions, partant du postulat (sorti d'on ne sait où) qu'un produit sur trois en promo était vendu avec zéro de marge. Les députés ont donc simplement estimé l'effet d'une hausse de prix de 10% sur un tiers des mises en avant en magasins.

Puisque les promotions représentent environ 20% des ventes (source FCD), un tiers de ce chiffre, soit 7%, qui augmente de 10% conduit à 0,7% d'inflation.

Un résultat valable toutes choses égales par ailleurs (alors que l'on sait que l'encadrement légal des promotions est lui aussi appelé à évoluer) et qui ne tient pas compte du fond de rayon.

L'hypothèse absurde de l'UFC-Que Choisir

Dans son étude d'impact, l'Assemblée nationale pousse également son raisonnement à l'extrême. Le choix de considérer une promo sur trois à marge zéro étant arbitraire, le rapport précise que si par exemple 100% des promos étaient déjà au SRP, alors le nouveau seuil entraînerait cette fois 2% d'inflation.

C'est cette hypothèse absurde que l'association UFC-Que Choisir a délibérément retenue pour s'en alarmer. Pas à une approximation près, elle a en outre traduit ces 2% d'inflation en 5 milliards d'euros qui seraient ainsi ponctionnés sur le pouvoir d'achat des ménages. On s'étrangle : cela revient à considérer que la grande distribution réalise 250 milliards d'euros de ventes alimentaires en France. Alors que le chiffre d'affaires des enseignes GMS, tous produits confondus, dépasse à peine 200 milliards d'euros TTC (source Distribook 2018) !

En mettant bout à bout scénario fantaisiste et approximation grossière, UFC-Que Choisir multiplie au final par trois l'impact théorique du nouveau SRP. Mais 5 milliards, c'est frappant. L'annonce a donc bénéficié d'un bel écho médiatique, sans que personne ne vérifie l'opération...

Ce que l'association de consommateurs dénonce en revanche avec raison, c'est la répercussion plus qu'hasardeuse que le nouveau SRP est censé générer en faveur des agriculteurs.

Plus de marge pour les enseignes sur les blockbusters des multinationales ne profitera certainement pas aux producteurs français. Et la perspective de moindres péréquations qui relâcheraient la pression sur les produits frais agricoles n'est qu'hypothétique, faute de mesures directives en ce sens.

À lire dans le numéro de février de Linéaires

Notre enquête exclusive sur les prix

- le nouveau classement des enseignes

- grandes marques, petites marques, MDD, zone marché : un palmarès complet

- les écarts pointés entre drives et magasins

- la simulation détaillée de la hausse du SRP

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