Exclusif : Auchan face à ses difficultés
La filiale française du groupe nordiste enregistrerait un résultat d’exploitation en baisse de 50% sur les neuf premiers mois de 2016. Plus globalement, Auchan ne pèse plus que 28% de l’empire Mulliez.
Au moment de sa prise de fonction à la présidence d’Auchan Retail France, en octobre 2015, Patrick Espasa se vantait, en petit comité, de pouvoir tripler le résultat de la branche française du géant de l’hypermarché.
Un an plus tard, l’ex-patron de la filiale roumaine a certes mis un terme aux aventures de l’ère Mignot, le précédent directeur général, mais il est loin d’avoir redressé les comptes dans l’Hexagone. Pire, sur les neuf premiers mois de l’année écoulée, la France verrait son résultat d’exploitation divisé par deux par rapport à l’année précédente, à 25 millions d’euros. Ce bilan a été dressé lors de l'assemblée générale familiale des Mulliez qui s'est tenue début décembre, et dont certains propos ont été rapportés à Linéaires.
Au cumul à fin septembre, Auchan France générait à peine 8% de l’Ebit global du groupe, marginalisant un peu plus la filiale tricolore au sein d’un ensemble réalisant désormais l’essentiel de ses profits en Chine et en Russie. Au niveau du groupe, le résultat d’exploitation serait en repli de 15% sur les trois premiers trimestres.
La question Valauchan
Après 2015 et le recul historique de la valeur de la part Valauchan (-3%), l'année 2017 signera-t-elle une nouvelle année de baisse ? Les difficultés d'Auchan France sur l'exercice 2015 avaient suscité les mêmes inquiétudes, mais n'avaient finalement pas empêché le titre de progresser de 2,1% en 2016.
A l’automne 2015, la nomination de Wilhelm Hubner comme président du directoire du groupe Auchan Holding et directeur général de la branche Retail traduisait la volonté de l’association familiale de ne pas laisser tous les pouvoirs à Vianney Mulliez. L’échec partiel de l’alliance avec Système U (un projet qu’il portait à bout de bras depuis le début) a constitué un nouvel élément affaiblissant le président du conseil de surveillance d'Auchan Holding.
Vaisseau amiral depuis des décennies de la flotte des enseignes Mulliez, le groupe Auchan ne représente plus aujourd’hui que 28% de la valeur de l’empire nordiste. "Plus dynamiques et plus rentables, Adeo (Leroy-Merlin), Décathlon ou HTM (Boulanger) grignotent chaque jour un peu plus la contribution relative du géant de l’hypermarché à la fortune du clan roubaisien", observe Bertrand Gobin, auteur de La face cachée de l’empire Mulliez (Ed. La Borne Seize).
Auchan a revendu Alinéa... aux Mulliez
Permettre aux filles de devenir des sœurs : un véritable credo au sein de la galaxie Mulliez, visant à transformer les filiales en entreprises autonomes une fois la maturité atteinte. Chez Alinéa, restée depuis 1989 au sein du groupe Auchan, la mue aura mis 26 ans à s’opérer...
Faute de résultats satisfaisants, ce sont les difficultés financières qui sont à l’origine de ce réaménagement actionnarial. Au cours des deux derniers exercices, l’enseigne d’ameublement a affiché des pertes annuelles d’environ 10 millions d’euros pour un chiffre d’affaires de 420 millions d'euros HT en 2015.
Alinéa, jusque-là dirigée par Philippe Detavernier, a été reprise en novembre par Alexis Mulliez, le président de son conseil de surveillance, avec l’association familiale Mulliez. Un tour de passe-passe capitalistique au sein du clan qui présente un double avantage : financier pour Auchan, qui élimine un foyer de pertes, et au plan de la gouvernance pour Alinéa, dont le destin ne sera plus lié à celui de son ex-maison-mère.