Améliorez vos performances grâce au pricing

5 juillet 2006 - Patricia Bachelier

Garder une cohérence de prix, dans le temps et entre les catégories

Qu’il soit mené en fonction d’un impératif de marge ou selon une politique systématique d’alignement sur la concurrence, le pilotage de prix doit s’effectuer de manière mesurée et respecter une certaine cohérence. Un point de vente qui fait trop souvent le yoyo à beaucoup à perdre, qu’il est le profil Leclerc ou Monoprix. « Les magasins les plus performants sont ceux qui sont les plus homogènes en prix, dans le temps mais aussi d’une catégorie de produit à l’autre, confirme Georges Ferronnière directeur marketing de Panel International, lequel appuie sa théorie sur des études quantitatives (cf. ci dessous). Le consommateur a besoin de repères et peut devenir méfiant à l’égard d’un point de vente qui les lui fait perdre. »

Construire une offre cohérente avec son image prix

Se donner une image discount, tel est le souhait de toutes les enseignes. Si la fixation de prix bas est une condition nécessaire, elle reste néanmoins insuffisante. Elle doit s’accompagner d’un assortiment cohérent, dans la construction de l’offre (marque nationale, MDD et 1er prix), mais aussi dans la sélection des références et leur implantation en linéaire (position sur la gondole, nombre de facings). Ainsi, un magasin peut s’enorgueillir d’un bon indice prix mais souffrir d’une mauvaise image si l’offre premium est surexposée, sur dimensionnée ou même systématiquement implantée à hauteur des yeux. Ce que certains appellent le « syndrome Carrefour ».
Cette règle de bon sens n’exclut néanmoins pas de se positionner intelligemment sur le créneau premium en ciblant les catégories. «Tesco est très compétitif et bénéficie d’une excellente image prix, mais assume parfaitement de proposer sur certains rayons une offre haut de gamme, illustre ce consultant. Ce choix est assumé parce que l’enseigne veille à rester agressive sur ces produits chers et parce qu’elle a mesuré que cela n’avait pas d’impact sur son image prix globale ». Avantage de cette approche fine ? Elle participe à une politique de péréquation de marge intelligente : compenser la compression de marge sur des prix bas sacrifiés par un coussin de marge obtenu sur des prix élevés moins bataillés.
Cette nécessaire cohérence ne s’exprime pas seulement à travers la construction de l’offre, mais aussi dans le bon étagement des prix et dans la bonne gestion des écarts entre marque nationale, MDD et 1er prix. « Il est plus dangereux de vendre une boîte de mouchoir 1er prix à un PVC cinq fois moins cher que le leader, que de manquer d’agressivité sur le leader, poursuit ce consultant. Un tel écart rend le client suspicieux, sur le bon positionnement prix du leader ou sur la qualité du mouchoir premier prix. ».
La bonne image prix tient à une offre claire, cohérente, facile à décrypter dans sa segmentation, comme dans ses prix. « Proposer plus d’une dizaine de références de lardons n’a pas de sens, illustre Kai Bandilla, directeur du cabinet de pricing Simon Kücher. Le client n’est pas capable de comprendre l’offre car il ne peut pas comprendre autant de PVC différents. Cela contribue davantage à brouiller l’image prix du rayon, qu’à satisfaire la demande».

Ajuster ses prix en fonction de la taille des concurrents

Dire que l’environnement concurrentiel s’avère déterminant dans le pilotage des prix relève de l’évidence. Reste qu’une forte densité commerciale n’implique pas nécessairement l’obligation d’être le plus compétitif possible. Tout dépend de la taille du magasin concerné et de celui de ses rivaux. « Contrairement aux idées reçues, un « gros » magasin qui draine une importante clientèle a moins intérêt à être très agressif que ses concurrents plus petits, explique ce consultant. L’effort réalisé en terme de marge est disproportionné par rapport au gain potentiel, car le chiffre d’affaires qu’il peut capter de ses concurrents est faible par définition. A l’inverse, le transfert de chiffre d’affaires est bien plus important d’un gros magasin à un petit ». Un ajustement tarifaire basé sur cette théorie permet, selon ce même consultant, de gagner en moyenne 0,5 pt de marge, sans pénaliser la performance commerciale.

Etre sélectif sur les produits destructeurs de marge

Tous les produits valent-ils la peine d’être vendus ? Pour les enseignes qui font de la marge leur priorité, la réponse est clairement non. Très en pointe sur l’analyse de sa rentabilité (le logiciel maison réaffecte notamment à chaque référence son coût d’occupation des sols, frais de personnel, etc.), Géant a, en son temps, levé le pied sur l’offre gros électroménager premier prix. Motif ? En intégrant le calcul des coûts de stockage, de SAV et du « loyer », la catégorie n’était qu’un foyer de pertes. Selon certains experts en stratégie, tous les distributeurs gagneraient à raisonner ainsi sur le non-alimentaire, pour se donner les moyens d’être (encore) plus agressifs sur les PGC. « Leur crainte principale est de perdre des clients s’ils suppriment une catégorie de produit. Mais ils parviennent pourtant rarement à le prouver», témoigne l’un d’entre eux.
« Pour les enseignes de proximité, la question du « sacrifice produit » se pose de manière aiguë sur les références phares de l’alimentaire, analyse Olivier de Panafieu, associé du cabinet de conseil Rolland Berger. Faute de pouvoir être compétitif sur le conditionnement phare du produit – type Nutella 750 g - certaines feront le choix de référencer un format différent pour éviter la comparaison frontale. » Une stratégie également bien connue de certains indépendants.

Les MDD, variables d’ajustement de la marge ?

Vouloir offrir un assortiment comptant 50 % de MDD comme l’ont annoncé certaines enseignes a-t-il un sens ? D’un point de vue consommateur, la réponse est plutôt non. Des études ont en effet prouvé que la surexposition de la MDD montre ses limites, en particulier dans les petits magasins, car elle nuit à l’attractivité du point de vente (cf. Interview Olivier Géradon de Véra dans le numéro de juin).
La réponse est en revanche différente d’un point de vue distributeur. Une enseigne qui promet 50 % de MDD renforce de facto son pouvoir de négociation vis à vis des fournisseurs : « tu soignes ma marge ou je favorise ma MDD sur ta catégorie ». Augmenter sa proportion de MDD, c’est aussi se donner les moyens d’améliorer la maîtrise de son image prix (puisque le distributeur a la main sur les PVC de la moitié de l’assortiment) voire d’accroître sa marge (plutôt meilleure que sur les marques nationales).
Le pilotage fin du prix de la MDD recèlerait un vrai gisement de marge sous-exploité aujourd’hui. « Se fixer comme règle un écart de 30 % par rapport à la marque nationale ne se justifie pas d’un point de vue consommateur, affirme Renaud Houri, Directeur Europe du Sud de DemandTec, le premier éditeur mondial de solution de gestion de la demande client.
Une référence MDD perçue aux yeux d’un client comme aussi bonne que le leader sur un critère déterminant (le goût d’un yaourt) tolère un faible écart de prix. En clair, la positionner 15 % moins cher (au lieu de 20) n’aura qu’un faible impact sur les volumes mais permet d’améliorer sensiblement la marge ». Pour qui veut piloter ses prix à travers la marge et non pratiquer un discount pur et dur, la MDD s’affirme comme l’un des leviers les plus efficaces dans la gestion des péréquations de marge.

Des bons prix ne font pas tout

Fonder sa stratégie prix sur l’alignement systématique de la concurrence est tout à fait justifié, pour qui fait du discount sa priorité. Ce pilotage est à la portée de tout magasin équipé d’un outil sophistiqué, capable de simuler l’impact sur sa marge et de sélectionner des produits en fonction de critères choisis, à l’instar de « Daisy » de Panel International (cf. pages précédentes). Attention néanmoins à ne pas tomber dans l’excès et se focaliser uniquement sur ce paramètre. Pour légitime qu’il soit, ce pilotage fin du prix ne doit pas faire oublier les autres fondamentaux du commerce (bonne tenue des rayons, etc.). Au risque de décevoir le client mais aussi de se priver « bêtement » de marge.

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